Couteau dit ``à la Palloy``
Ce couteau pliant présente un manche figurant un militaire de la Révolution, d’une taille exceptionnelle. Il porte une moustache, les cheveux noués en catogan, un chapeau haut et une redingote noire. Ce type de couteau est dit « à la Palloy », du nom de l’entrepreneur Palloy qui les a fait réaliser sous la Révolution.
Le patriote Palloy
Pierre-François Palloy, né à Paris aux alentours de 1754, était entrepreneur des bâtiments du roi au département de la vénerie et exerçait sa profession sans faire parler de lui jusqu’à la Révolution.
C’est lors de la prise de la Bastille, le 14 juillet 1789, que sa renommée et sa carrière politique vont prendre un essor certain. Conscient de l’énorme potentiel qu’il pourrait tirer de la démolition de la Bastille, il est l’un des premiers à s’y attaquer d’autorité. Le 16 juillet, il écrit au corps électoral : « je vous prie Messieurs de vouloir bien joindre à votre proclamation un ordre de continuer la démolition, si vous me croyez capable d’exercer mon courage….. ». A cette date, le parapet et une partie des créneaux de la terrasse étaient déjà démolis.
Le comité permanent de l’hôtel de ville se hâte de répondre par l’arrêté suivant : « le comité a arrêté que la Bastille serait démolie par tous les districts ensemble…….et que M. Palloy serait prié de continuer la démolition par lui commencé, et que l’ordre lui en serait donné ».
Entre 800 et 1000 ouvriers vont ainsi œuvrer à ce démantèlement, au prix de multiples rixes, malversations et incidents.
Ainsi mandaté de façon officielle, Palloy devient rapidement une figure incontournable, position renforcée encore par le titre de « patriote » dont il s’est affublé : il est désormais le « patriote Palloy ».
Les Objets dérivés
Dès le début, la question du remploi des matériaux va se poser : pierre, fer, bois, marbre, papier…… Une partie va être utilisée pour la ville de Paris, mais d’une façon infime.
Concernant le reste, Palloy va tout d’abord imaginer la construction de petites Bastilles en pierre, reproduisant fidèlement le modèle original ; idée qui va rencontrer un franc succès auprès des 83 départements nouvellement créés ainsi que lors des fêtes civiques diverses et variées. Il les offre puis s’efforce de les monnayer, abreuvant de supplications les diverses strates administratives.
Il s’atelle ensuite à proposer des pyramides en pierres de la Bastille, destinées à honorer des héros, tels le Chevalier d’Assas ou l’officier Desilles.
Au cours de l’année 1791, la distribution des débris de la Bastille atteint son apogée : aucune assemblée, aucune administration, aucun homme public n’y échappent.
Palloy fabrique avec ces matériaux les objets les plus variés : bustes, médaillons, statuettes, tabatières, presse-papiers, bonbonnières, encriers, bijoux, jeux de dominos (offerte au Dauphin), jeux de cartes, ainsi que des épées (offerte à La Fayette) et des couteaux, comme celui présenté ici.
Le couteau des vainqueurs de la Bastille
On les appelle également « couteaux des vainqueurs de la Bastille » : Ils auraient été destinés à récompenser les vainqueurs de la prise de la Bastille.
Couteau à cran d’arrêt pliant, il figure une effigie d’un grenadier de la Bastille, coiffé du bonnet à poil, une épée à la ceinture et les jambes paraissant articulées. Les côtés sont en ivoire et écaille, fixés par des rivets; la lame aurait été forgée dans un métal récupéré à la Bastille.
De par ses dimensions (33 cm fermé, 59,5 cm ouvert), celui-ci est remarquable, d’autant que peu d’exemplaires nous sont parvenus. Le musée le Secq des Tournelles en possède un de belle taille, ainsi que la collection Leclerc.